+ Le petit garçon que tu étais et l'adulte que tu es sont diamétralement opposés bien que l'amour des animaux reste inchangé, leur trouvant une loyauté et une tendresse que les humains sont incapables de donner. Il y a pourtant un fond de l'adulte qui aimerait retrouver cette innocence, cet amour même pour la vie, pour les autres, perdu dans une haine qui te ronge.

+ C'est à l'âge de 15 ans que tu découvriras ton attirance pour les hommes. Très peu attiré par ces filles qu'on te présentait pour "lier d'amitié" les adultes espérant secrètement une amitié qui grandirait en amour. C'est pourtant ce garçon dans ton école qui aura ton attention, empourprant tes joues, faisant palpiter ton coeur. Une attirance que tu tairas, par peur, par ignorance. Dur de comprendre ses propres sentiments quand personne n'évoque cette possibilité. Mais grâce à des camarades de classe tu finiras par comprendre, par te l'avouer, sans pour autant en parler.

+ Secret, tu voulais que cette relation soit secrète, malgré tout l'amour que tu lui portais, tous ces moments passés ensemble. Il t'acceptait comme tu étais, parce qu'il t'aimait. C'était ses mots, ceux qui avaient réussi à te rassurer, à te plonger dans une confiance aveugle. Une belle idylle. Une belle aventure, qui durerait, tu en étais persuadé, préparant ton discours pour des parents encore traditionnels et rigides.

+ Murmures, rires, regards dégoûtés. Cette journée restera à jamais dans ta mémoire, gravée au fer rouge. Tu entends encore leurs remarques déplacées, leurs taquineries faites pour te pousser au bord d'un précipice que tu auras vu de près. L'incompréhension. Un sentiment douloureux qui vous rend soupçonneux de tout, de cet ami, de cet ennemi, cette personne avec qui tu n'avais jamais parlé. Mais ta torture ne dura pas si longtemps, rapidement épinglée sur les murs, sur ton bureau, une photo. Simple mais destructrice. Une photo personnelle, intime, une secrète, encore plus que ta relation, avec un homme. Un homme sans visage, que tu reconnaissais mais qu'on oubliait pour ta personne. C'était toi qu'on désignait, toi qu'on accablait, sur cette vie qui était la tienne, que tu pensais privée, et qui se transforma en publique.

+ Exposé, moqué, insulté, tu as vu ta vie basculer à simplement 17 ans après la diffusion de cette photo, placardée ou tournant sur le net ce fut ton nom qu'on souilla pour une orientation, pour une photo "osée" pour un comportement qu'on condamnait. Tu cherchas tout de même l'auteur de cette photo obligé d'admettre que la seule personne pouvant la diffuser était celui avec qui tu partageais ton coeur et ton lit. Une claque dont il profita pour te quitter, simplement.

+ Détruit. On t'avait détruit, et on continuait dès que l'occasion se présentait. A l'école ou sur internet, tu n'avais plus aucun moment de répit les sonneries de ton portable n'en finissait plus. Finissant par l'écraser au sol dans une rage inconditionnelle. Et même après ce changement de numéro, demandé toujours dans le silence de la personne que tu étais, de ce que tu vivais, rien ne changeait. Les textos continuant d'affluer, les sujets ne semblant jamais disparaître. Le sommeil se faisait rare, ta santé déclinant aussi vite que tu avais été le sujet numéro un.

+ C'est après de longs mois, les larmes faciles et l'envie d'en finir que tu en avais parlé à tes parents. Cherchant leur soutien, leur présence pour porter plainte au commissariat. Mais tu n'étais plus le fils qu'ils connaissaient, plus leur petit pantin bien articuler. Tu étais la honte de la famille, le débauché qui allait ternir leur réputation. Ta seule salutation fut cet argent qui fit étouffer l'affaire, retirer la photo, tout ça pour que ça n'aille pas trop loin aux oreilles de leurs amis.

+ Il t'a fallu plusieurs mois d'ignorance de leur part pour partir. Fini le lycée tu quittais le cocon familial pour arriver dans un endroit délabré, mais qui coutait si peu, que tes jobs ponctuels pouvaient te le payer. Tout ça pendant deux ans où tu apprenais sous la bienveillance d'une dame comment toiletter n'importe quel chien. Le sourire toujours présent lorsque tu accueillais ces boules de poils tu le perdais rapidement une fois la porte passée.

+ Depuis quelques temps tu partages un appartement avec un certain Noeul. Et s'il est d'une maladresse incroyable tu adores sa cuisine. Tu te moques, tu souffles mais il n'est pas méchant, t'es juste un sale gosse qui vit comme un ermite. LEs soirées mousse par l'oubli de la baignoire, les confettis de chips, les chutes à cause du sol glissant, tout ça, c'est juste pas de quoi tu as l'habitude. Mais il est gentil Noeul. Il a bon fond, et tu lui pardonnes toujours.

+ Tu as la mauvaise habitude de réclamer à Noeul le repas, sinon " tu le manges". Une façon de dire que t'as faim. Ça t'ait déjà arriver de mordre son bras, jamais bien fort.