Han Su n'était pas du genre à s'inquiéter sans raison et il savait aussi que certaines personnes avaient besoin d'espace. Il le comprenait bien, même s'il ne leur accordait pas forcément à chaque fois. Son côté un peu envahissant surement.. Ce qui l'avait empêcher de se rendre chez Hsiao Chun plus tôt ? Le fait que son boulot lui ai prit bien plus de temps qu'il ne l'aurait pensé. Continuant d'envoyer des messages à son meilleur ami depuis trois jours maintenant. Cela faisait TROIS jours qu'il n'avait plus de nouvelles ni de réponse à ses sms ou ses envois sur Line. Oui parce que le Coréen ne se gênait pas pour l'inonder, pire que s'il était son mec.

Après un énième soupir, il décida de quitter son bureau un peu plus tôt, pas moyen de se concentrer.. Il n'avait même pas lu ses messages. Est ce qu'il allait bien ? Avait il encore eu des soucis ? Peut être que quelqu'un lui avait encore fait du mal.. Est ce qu'au moins il s'était bien nourri ces derniers jours ? Han Su n'était pas un super cuistot, mais il s'en sortait pas trop mal, ayant du s'occuper de ses propres repas assez rapidement tout de même. Des trucs basiques, rien de bien fou, mais c'était toujours mieux que de dépenser des centaines dans des commandes de nourriture toute prête.

Une fois sur le trottoir, il appelle un taxi et donne l'adresse du policier. Heureusement, il garde toujours la clef de son appartement avec la sienne et il sort donc déjà le trousseau en apercevant le quartier de son meilleur ami. Ca faisait un moment qu'ils se connaissaient maintenant, bien qu'ils aient du suivre leur relation amicale par visio ou en ne se voyant qu'en de rares occasions de vacances durant une période. C'était un plaisir de vivre à nouveau dans la même ville. Ca lui avait fait si plaisir de pouvoir se rapprocher de l'autre homme, qui lui avait bien manqué. Evidemment, ils se connaissaient assez bien pour se raconter tout ou presque. Han Su encore trop souvent secret sur ce qu'il ressentait vraiment au fond de lui, même si Hsiao Chun avait tendance à comprendre quand il lui faisait des cachotteries ou qu'il lui sortait un mensonge un peu trop flagrant.

Arrivant enfin en bas de son immeuble, il monte vers son appartement et ne prend même pas la peine de frapper ou sonner, trop inquiet pour patienter derrière la porte. Ouvrant directement, il écoute à l'intérieur s'il entendait du bruit. Ca semblait silencieux. Peut être un peu trop. Son coeur accélère et l'inquiétude grandit un peu plus.

- Hsiao ?! Tu es là ?

Faites qu'il soit bien chez lui.. Refermant la porte derrière lui, il regarde avec un petit froncement de nez l'état de l'appartement.. Ah bah, s'il était là, c'est sur que Han Su allait lui faire faire un peu de ménage hein. Un vrai dépotoir encore une fois, comme souvent lorsqu'il avait tendance à s'enfermer dans son appart'. Des bols et paquets de nouilles, des fringues, des papiers.. Un soupir quitte ses lèvres. Décidément, son ami se laissait un peu trop aller. Etait ce une conséquence de sa dernière rupture..? Il ne saurait vraiment le dire, peut être qu'il était déjà comme ça avant, mais qu'il ne s'en rappelait simplement plus.

Je l'avais vu, Krit, avec un autre homme dans la rue. Lui ne m'avait pas aperçu, je m'étais rapidement caché derrière une poubelle. Nous n'étions plus ensemble depuis des mois mais le voir avec quelqu'un d'autre me broyait toujours autant le cœur. S'il avait réussi aussi facilement à tourner la page, c'était parce que lui avait réussi à ne plus avoir de sentiments pour moi. De mon côté, c'était différent. Je vivais un amour unilatéral à l'envers, ce qui était assez comique. Je tentais pourtant de l'oublier, en me jetant à bras ouvert dans mon boulot. Au début j'avais essayé avec l'alcool ou dans les bras d'inconnues rencontrés dans un bar ou en boîte mais ça n'avait rien changé. Il n'y avait véritablement que lorsque je me focalisai pleinement sur une enquête que j'arrivais à effacer le visage de mon ex de mon esprit. Pourtant, il y avait bien un barman qui me plaisait mais j'avais encore le cœur remplit de sentiments pour Krit. Ce n'était même pas de la jalousie qui me traversait quand je voyais mon ancien petit ami accompagné, mais une grande tristesse. Et l'envie de tout casser aussi. Heureusement, j'avais appris à garder mon sang froid et attendre de me retrouver devant un sac de sable pour me défouler.

Tout ça pour dire que ma dernière "rencontre" avec Krit m'avait poussé une nouvelle fois hors ligne, au sens propre comme au sens figuré. De chez moi je pouvais me connecter au serveur de la police et avait commencé à ressortir les dossiers compliqués. Pour ma vie sociale, j'étais mort. Plus de sons, ni de lumières. J'entendais mon portable vibrer mais sans jamais regarder ou répondre. Je devais oublier mon ex. Combien de temps cela mettrait-il à passer ? Je n'en savais rien. J'ignorais combien de temps j'étais resté enfermé chez moi à juste faire des pauses pour passer à la salle de bain et manger des nouilles instantanées. Mon frigo était vide, j'avais juste encore quelques canettes de bières. Un bruit m'avait soudainement sorti de mes feuilles où je tentais de rassembler des données. Un voleur ? Les bâtards qui m’avaient enlevé ? Depuis mon kidnapping je devenais nerveux au moindre bruit suspect et parfois, je dormais même la lumière allumé. Il n'y avait que lorsque je passai la nuit avec quelqu'un que je fermais l’œil correctement. Étant célibataire, c'était donc un peu compliqué quand l'heure de se coucher arrivait.

Par prudence, j'attrapais mon arme à feu au cas où. Ce n'était peut-être rien. Juste l'appartement qui faisait des siennes ou un esprit qui avait fait tomber un truc. Je me dirigeais sur la pointe des pieds vers le salon, quittant ma chambre et évitant des vêtements éparpillés sur le sol. Je ne savais même pas comment je faisais pour mettre autant de bordel. Ou si, je me déshabillai juste sans mettre mon linge dans la corbeille. Si de base j'étais bordélique, c'était encore pire quand je traversais une mauvaise phase. Je faisais irruption dans la pièce, mon flingue braqué sur l'intrus avant de reconnaître mon meilleur ami. Heureusement que je n'avais pas enlevé la sécurité.

- Han Su ! Tu m'as fait peur !

Je baissais mon arme maintenant que je savais que ce n'était pas un tueur qui était entré chez moi.

- Il y a un problème ?

D'habitude il m'envoyait toujours un message pour savoir si j'étais chez moi ou au travail. Il avait le double des clés alors il pouvait rentrer sans que je sois présent, mais bon, ça serait dommage qu'il vienne alors que je n’étais pas seul par exemple. Ou que je n'allai pas rentrer tout de suite à cause du boulot. J'avais posé la question de manière sérieuse, avant de me traiter intérieurement d'imbécile quelques secondes après : je n'avais pas regardé mon téléphone.

- Désolé, je me suis encore coupé du monde sans te prévenir...

C'était une fâcheuse habitude que j'avais. Mais la plupart du temps cela arrivait sans que je ne m'en rende compte.

L'état de l'appartement laissait bien voir que cela faisait un moment que son ami n'avait pas fait de ménage.. Et aussi qu'il se nourrissait uniquement de nouilles instantanées ces derniers jours. Poussant un soupir, il l'avait interpellé pour savoir s'il était là ou non. N'ayant obtenu aucune réponse, il avança un peu dans le couloir en repoussant les affaires gênante du bout de son pied. Pour le coup, il ne chercha même pas à se déchausser, pas question de marcher en chaussettes dans ce qui était plus proche d'un taudis que réellement d'un appartement.

Il n'entendit pas Hsiao arriver sur le moment et eut donc un petit sursaut de surprise de le voir pointer son arme sur lui alors qu'il tournait la tête vers l'une des portes.. Levant automatiquement les mains, il battit des cils quelques secondes. Avant de froncer un peu les sourcils autant à sa remarque qu'à sa question. C'était une blague..?

- Sérieusement ? C'est pas plutôt moi qui devrait avoir peur ? Ah franchement..

Un nouveau soupir quitte ses lèvres et il balaye du regard les dégâts du manque de rangement, avant de regarder à nouveau le policier en face de lui.

- J'ai vu ça en effet et je me suis inquiété, tu le sais ? Je t'ai envoyé je ne sais combien de messages et j'ai essayé de t'appeler un nombre incalculable de fois. J'ai cru qu'il t'était arrivé quelque chose !

L'inquiétude se lisait clairement sur son visage et dans ses yeux, même s'il y avait aussi une petite pointe de mécontentement. Han Su n'aimait pas ça lorsque son meilleur ami faisait silence radio, parce qu'il savait qu'avec son métier, n'importe quoi pouvait lui arriver. Et il était intérieurement terrifié d'apprendre un jour qu'il était à l'hôpital dans un état critique ou pire.. qu'on lui dise que son corps sans vie avait été retrouvé.. Un frisson glacé le traverse à cette pensée et il essaye de la chasser de son esprit.

- Qu'est ce qu'il s'est passé pour que tu te coupes de tout ?

Doucement, prudemment même vu l'état du sol, il s'approche de son ami et vient poser une main sur son épaule. La pressant avec toute l'affection qu'il ressentait pour l'autre homme.

Accueillir son meilleur ami avec un flingue était surement le pire accueil que je lui avais fait depuis qu'on se connaît. Mais il m'avait vraiment fait peur, du moins j'avais cru qu'un voleur était entré chez moi. Heureusement, ce n'était que Han Su. Je me demandais bien ce qu'il faisait ici, d'habitude il appelait. Une question que j'avais posée avant de me souvenir que mon téléphone était passé aux oubliettes depuis quelques jours. Mon appartement aussi était passé en second plan lorsque je remarquais l'état de mon salon. Entre les vêtements, les paquets de nouilles instantanées et la vaisselle, c'était pire qu’une déchetterie. J’étais bordélique de base, mais là je devais avouer que c’était encore pire.

- Désolé, c'était pas mon but

Qu'est ce que je pouvais dire d'autre ? Je faisais un métier à risque et suite à ce qu'il m'était déjà arrivé c'était normal que mon meilleur ami panique en ne voyant aucun signe de vie de ma part. Je ne savais pas comment régler mon problème de bulle lorsque j'étais focalisé sur une enquête. Même si cette fois-ci, c'était pour oublier quelque chose ou plutôt quelqu’un. Han Su savait très bien que lorsque j'entrais dans cette "phase" c'était qu'il s'était passé un truc. On se connaissait depuis pas mal d'année et j'avais vraiment été content le jour où il m'avait annoncé qu'il comptait s’installer à Bangkok.

- Je l'ai vu dans la rue...avec un autre homme et...je me suis senti mal. Alors j'ai préféré me focaliser sur mon boulot plutôt que de me morfondre encore...

Je n'avais pas besoin de dire son nom, mon meilleur ami savait de qui je parlais. Il était au courant que j'étais bisexuel et de mon histoire avec Krit. Que je n’arrivais pas à tourner la page. Il était d'ailleurs celui qui m'avait consolé suite à notre rupture, aidé à remonter la pente même si actuellement elle était parfois encore glissante. Heureusement d'ailleurs, car sinon je ne sais pas de quoi j'aurai été capable. Surement de faire des missions suicidaires. Ce que je faisais déjà plus ou moins en continuant mes enquêtes sur les trois plus grandes familles de gang de la ville. Il suffisait de voir l’état de mes mains, un joli souvenir qu’on m’avait laissé.